Les curistes n’ont généralement pas besoin d’études pour être convaincus des bienfaits de la médecine thermale. Pour autant, la démonstration des bénéfices d’une intervention médicale nécessite de réaliser des études cliniques. Depuis près de 20 ans, l’Association Française pour la Recherche thermale (AFRETh) finance des études pour évaluer le service médical rendu par un séjour en station thermale, et faire évoluer la prise en charge du curiste.
Qu’est-ce que l’AFRETh?
Fondée en 2004, l’AFRETh a pour objectif de promouvoir la recherche clinique en médecine thermale par des méthodes scientifiques éprouvées. Depuis sa création, elle a ainsi financé plus de 60 études cliniques dans les différentes orientations de la médecine thermale : rhumatologie, phlébologie, dermatologie… L’AFRETh s’engage contractuellement à publier les résultats de ces études, qu’ils soient ou non favorables à la médecine thermale, et à les communiquer à l’Assurance maladie chaque année.
L’AFRETh est composée d’un conseil d’administration et d’un conseil scientifique. Le conseil d’administration réunit les représentants des trois partenaires fondateurs : le syndicat des entreprises thermales (CNETh), l’Association nationale des maires de communes thermales (ANMCT) et la Fédération thermale et climatique française (FTCF). Il lance et gère les appels d’offres annuels auprès de plus de mille organismes de recherche et chercheurs. Il s’appuie sur les recommandations du conseil scientifique pour attribuer ses financements, soit, en moyenne, près d’un million d’euros par an.
Le conseil scientifique, pour sa part, se compose de six à douze experts reconnus sur le plan scientifique (professeurs, dont certains, membres de l’Académie nationale de médecine, et médecins appartenant à différentes structures publiques de recherche), qui ne prennent part à l’évaluation d’une étude qu’après vérification d’absence d’intérêts avec les parties prenantes. Il transmet des préconisations au conseil d’administration, pour lui permettre de prendre des décisions éclairées, notamment dans l’élaboration de la politique générale de recherche thermale et le choix d’études dont la robustesse méthodologique a été validée.
L’AFRETh: garante de la scientificité des études thermales
Pour garantir la rigueur scientifique des études financées, l’AFRETh sélectionne avec soin les répondants de ses appels à projets.
Ces derniers doivent proposer des études cliniques qui répondent du mieux possible aux exigences scientifiques actuelles : le type d’étude privilégié est l’essai contrôlé randomisé (ECR). Contrôlé parce qu’il y a deux «bras» ou deux groupes, l’un bénéficiant de la cure thermale et l’autre de l’intervention de référence en médecine de ville. Randomisé, parce que les deux groupes sont constitués par tirage au sort de façon à éviter le biais d’adhésion qui résulterait de la préférence individuelle pour un traitement plutôt qu’un autre.
Il faut enfin définir un critère quantifiable, et cliniquement pertinent, c’est-à-dire qui corresponde à une évolution significative d’un symptôme majeur de la pathologie (par exemple: une amélioration d’une amplitude 10° dans la mobilisation d’une articulation n’est pas pertinente si elle ne permet pas de réaliser tel geste quotidien).
Ces critères, et d’autres, sont nécessaires pour que ces études soient publiées dans des revues internationales de bon niveau, et reconnues comme contributives par les autorités chargées de l’élaboration des recommandations en santé (la Haute Autorité de santé en France).
Pour chaque dossier, le conseil scientifique sollicite ensuite deux avis extérieurs, l’un auprès d’un expert clinicien, l’autre auprès d’un expert de la méthodologie, qui sont synthétisés par un rapporteur, membre du conseil scientifique sans lien d’intérêt avec le projet. L’AFRETh agit avec une grande rigueur, qui est d’ailleurs saluée à l’étranger, puisqu’elle est souvent citée comme modèle à l’échelon international.
Quels sont les sujets de la recherche thermale en 2023 ?
Les priorités de la recherche thermale pour 2023 et le proche avenir sont dictées par deux considérations :
- D’une part, dans le cadre du Projet de loi sur le financement de la sécurité sociale (PLFSS 2023), par la nécessité de préparer la médecine thermale à son évaluation par les autorités. Il s’agit d’investiguer des pathologies pour lesquelles les preuves, autres qu’empiriques, sont encore insuffisantes : c’est le cas notamment des indications dans les voies respiratoires hautes (ORL) et basses, mais aussi des voies digestives.
- D’autre part, par l’évaluation de nouveaux champs de compétence de la médecine thermale, en particulier dans le domaine de rééducation-réadaptation. La prise en charge du Covid long en est un exemple, mais il existe plusieurs situations cliniques (exemples : post traumatisme, post chirurgie, post AVC…) où l’intervention thermale est pertinente, à un coût très compétitif pour la collectivité.
« La recherche thermale, comme toute autre démarche scientifique, nous incite à l’humilité en même temps qu’à l’ambition de faire progresser une méthodologie qui servira peut-être de référence à l’évaluation des interventions complexes »
Docteur Renée-Claire MANCRET, Présidente du conseil d’administration de l’AFRETh.
Bien sûr, il reste encore des progrès à faire dans la préparation et la réalisation des essais cliniques en médecine thermale, qui sont beaucoup plus complexes à concevoir et à organiser que les essais cliniques habituels en médecine, notamment du fait de la difficulté à recruter et à randomiser les malades, à définir les patients témoins et à choisir des critères de jugement pertinents, ainsi qu’à évaluer les interventions en insu de la randomisation (il est essentiel que les évaluateurs ne sachent pas si un patient appartient au groupe cure thermale ou au groupe contrôle).
En outre, il ne faut pas réduire l’évaluation du service médical rendu par les cures thermales à celle de leur efficacité. Ce qui est le plus important, c’est leur utilité pour le patient, fondée certes sur l’efficacité, mais aussi sur d’autres critères qui concourent à l’amélioration de l’état clinique du patient.